Fin janvier, Handshake a organisé une table ronde regards croisés à Paris en collaboration avec une école de commerce lilloise sur le thème de l'engagement étudiant dans les processus de recrutement.
Nous avons eu la chance de pouvoir réunir cinq écoles de management, deux écoles d’ingénieurs, un institut d’études politiques et trois recruteuses issues de 3 secteurs différents : conseil, banque et luxe. Les échanges ont été riches d’exemples, de partages d’expériences et de questionnements, le tout dans un univers gastronomique.
Cet article a pour objet de rendre compte de façon synthétique des échanges et partages, pour faire bénéficier écoles et entreprises des retours d’expériences des participants. Les exemples décrits et les observations des participants ont été sélectionnés pour leur pertinence et leur possible application quelle que soit l’école, la spécialité ou les attentes de recrutement.
L’engagement étudiant est un enjeu pour toutes les organisations et entreprises, quelles qu’elles soient, y compris les plus prestigieuses. L’implication dans les activités liées au projet professionnel est un indicateur sous haute surveillance, reflet à la fois de la mobilisation des équipes, de l’attractivité des événements, mais aussi de tendances liées aux comportements de la nouvelle génération d’étudiants.
Pour les écoles, cette étape est aussi le gage de la réussite d’un parcours académique, l’insertion professionnelle et le démarrage de la carrière étant largement mesurés dans les classements des écoles.
L'engagement étudiant, au sens large, peut se définir comme une participation active des étudiants dans une étape de leur cursus académique. Pilier de la relation qui unit les étudiants avec leur école, l’engagement est de plus en plus observé et mesuré.
Dans le cadre spécifique du processus de recrutement, l'engagement étudiant va pouvoir se mesurer par la participation aux événements de recrutement organisés par les services carrière des écoles, le nombre et la pertinence des candidatures, la préparation aux étapes du recrutement, et enfin l’investissement dans le poste qui a été choisi.
Afin que les étudiants adoptent une attitude proactive dans ces différentes étapes, chaque acteur, côté école et entreprise, va avoir un rôle à jouer.
Voici quelques exemples illustrant à quel point l’engagement étudiant est pris en main, et démontrant la diversité des actions. Cet échange a permis à certains recruteurs de mieux comprendre le rôle des Services Carrières au sein des écoles et les challenges rencontrés en interne. De quoi permettre de créer de meilleures synergies écoles-entreprises à l’avenir.
Initiatives visant à renforcer les actions des services carrières
Initiatives axées sur le développement de soft skills
Initiatives originales et ludiques
Pour tous ces exemples, une collaboration active avec les programmes ainsi qu’un soutien de la direction de l’école ont été mentionnés comme gage de réussite des actions menées.
A travers les problématiques rencontrées, se sont dessinées 3 tendances partagées par toutes et tous :
Les attentes des étudiants envers les entreprises, axées sur la flexibilité, le salaire et le sens, se sont intensifiées, en particulier depuis la période de la Covid-19.
Il devient crucial pour les entreprises de faire des efforts supplémentaires pour attirer ces candidats. Et après le recrutement, de pérenniser des actions avec de les fidéliser et d'éviter un départ rapide des jeunes embauchés après le recrutement - la moyenne de durée sur le premier poste est d'environ un an. En réponse, les entreprises mettent en place des programmes d'accompagnement et de formation dès l'arrivée des jeunes, favorisant leur évolution en interne, et des étapes progressives d'apprentissage et de responsabilité.
Très médiatisé, le sujet de la RSE et du développement durable n’a laissé aucun participant indifférent.
Il semble que les étudiants sont parfois partagés, entre les valeurs qu’ils recherchent et la façon qu’ils vont trouver de les associer à leur carrière. La politique RSE d’une entreprise semble passée au crible. Mais alors, vaut-il mieux une Startup avec des valeurs RSE affichées, et un modèle de développement très business ? ou un groupe du CAC40 et dans lequel il y a aura des moyens, notamment financiers, pour changer les choses et avoir un plus fort impact in fine ?
Quel est alors le meilleur parcours pour un jeune diplômé ? Quel métier aura le plus d’impact ?
Les étudiants ne semblent pas toujours arbitrer les choix par rapport à leur projet.
Au-delà de leurs attentes, leur demander des actions concrètes (qu’est-ce que RSE ou développement durable signifie pour eux ? Et comment envisagent-ils de contribuer à une telle démarche au sein de l’entreprise?) permet de recentrer la discussion sur l’impact individuel et de sortir des grands discours sans lien direct avec une entreprise et une activité précise.
À l'ère de l'information et de la communication instantanées, les étudiants et les entreprises manquent de patience et ont besoin d'être rassurés par le career center.
Si certains étudiants trouvent rapidement un stage ou un poste, un grand nombre va chercher plus longtemps et s’inquiéter de ne pas trouver “assez vite”.
Les entreprises s'inquiètent aussi si elles ne trouvent pas le candidat parfait sur les forums carrière.
Les careers centre ont alors la responsabilité délicate de proposer des offres pertinentes tout en accompagnant les entreprises dans la construction de la relation avec les étudiants.
Ces tendances sont marquées par des attentes de la part des étudiants, envers leurs écoles ou leurs futures entreprises. Les écoles et les entreprises prennent en compte ces besoins et s’y adaptent pour garantir le meilleur engagement étudiant. Pour autant, leur rôle d’accompagnement reste crucial et se doit d’apporter les ressources et les compétences nécessaires aux étudiants pour naviguer le monde professionnel qui les attend.
Le rôle des écoles et en particulier des services carrières est de contribuer à la connaissance du monde de l’entreprise. Proposer des événements en lien avec les attentes des étudiants est important, ouvrir les possibles aussi. Cela contribue à éveiller les étudiants à de nouveaux horizons professionnels, et aussi à aller chercher la masse silencieuse des étudiants qui ne savent pas encore ce qu’ils veulent faire après leur diplôme.
Majoritairement les étudiants demandent une interaction directe avec l’entreprise, privilégiant le face à face et le contact individuel.
La construction du projet professionnel commence par le choix d’un cursus académique mais aussi par la réflexion sur les compétences que nous souhaitons apporter à une entreprise. Grâce aux actions mises en place par les services carrières et à une synergie renforcée avec les programmes, les étudiants ont l'opportunité de travailler savoirs et savoir-faire au service de leur projet. Leur chance de trouver le poste qui leur correspond et pas seulement un poste disponible, est clairement meilleure. Ce sont les premiers pas d’une carrière qui pourra refléter leurs aspirations et ambitions.
Les écoles ont été très à l'écoute des envies et des aspirations des étudiants dans le développement de leur offre pédagogique.
Services carrière comme recruteurs observent cependant que les choix de formation des étudiants ne sont pas toujours alignés avec leurs projets professionnels et avec les besoins des entreprises.
Par exemple, de plus d'étudiants suivent des parcours bilingues sans pour autant se tourner vers des carrières internationales. À l'inverse, aux yeux des recruteurs, avoir suivi une formation en anglais ne dispense pas de maîtriser la langue du pays d'accueil dans le cadre d'une expatriation.
Parmi les attentes partagées, le télétravail pour les étudiants est important, en particulier à la carte. Il peut être délicat de concilier cette demande avec les équipes plus traditionnelles.
Travailler en présentiel et avec d’autres générations permet de monter en compétences et reste indispensable pour intégrer des compétences moins faciles à formaliser, comme la gestion de conflit, la gestion de la relation client.
Les échanges en présentiel permettent également de remettre en perspective les idées et interrogations que peuvent avoir les jeunes diplômés par rapport à leur carrière, et de s’inspirer des modèles observés.
Enfin, pour se sentir bien dans une équipe et se projeter dans l'entreprise, il est essentiel de maîtriser les codes, de s'approprier la culture et d'avoir un bon réseau en interne. Le télétravail fragilise cela.
Comment ces évolutions vont impacter les métiers des services carrières ou du recrutement à terme ? Quelles sont les pistes pour trouver les modèles de demain ? 3 pistes de réflexion ont été évoquées :
Aujourd’hui les étudiants souhaitent un discours transparent de la part des entreprises. Et au-delà des success stories très partagées, ils attendent de se confronter à la réalité des problèmes. Certaines écoles et entreprises partagent ainsi des échecs et montrent comment ces situations peuvent être source d’apprentissage.
Par ailleurs, les modèles d’emploi traditionnels sont questionnés par la nouvelle génération. Si les écoles communiquent beaucoup sur les placements en CDI, parce que demandé par les classements français ou internationaux, les étudiants eux le voient de moins en moins comme un indicateur de réussite professionnelle.
Les étudiants s’orientent de plus en plus vers des missions et expériences de courte durée pour acquérir rapidement des compétences. Ainsi, un tiers des jeunes diplômés va changer d’entreprise 3 fois en 3 ans.
Les étudiants sont majoritairement plus à l’aise avec l’IA que les services carrières ou les entreprises. Pour autant, l’école peut aider à préparer sa carrière en fournissant un encadrement et des recommandations de contenu plus pointues.
Même si cet outil peut susciter peurs et méfiances, il existe de réels bénéfices pour les équipes. Les outils d’IA peuvent prendre en charge les recommandations générales, répondre aux interrogations des étudiants au jour le jour et permettre des temps d’échanges plus qualitatifs avec les services carrière.
Tout comme LinkedIn n’a pas remplacé les recruteurs, l’IA ne remplacera pas une école ou un accompagnement personnalisé. Si l’IA peut aider les candidats à mieux se mettre en valeur dans le processus de recrutement, c’est bien l’humain qui va permettre de les départager .En effet, si toutes les lettres de motivation sont faites via de l'IA, il devient compliqué de les utiliser pour départager les candidatures et le gain de temps est nul. CV et entretiens restent donc prioritaires dans la décision. Toutes les démarches proactives faites par les candidats - approches directes, contacts recruteurs et managers - sont d’autant plus valorisées.
Dans les cas spécifiques de recrutement sur des compétences “dures” et savoir-faire techniques, comme cela peut être le cas pour les ingénieurs, l’IA n’a que peu d’impact sur les candidatures.
Enfin, si cet outil peut permettre de simplifier des tâches comme la rédaction d’offres de recrutement, les recruteuses présentes se sont accordées sur le fait qu’à l’avenir la non utilisation d’IA dans le filtrage des candidatures, et donc leur authenticité, qui permettra aux entreprises de se démarquer aux yeux des candidats.
Les exigences des étudiants sont de plus en plus fortes mais toutes ne vont pas nécessiter de repenser en profondeur la manière de travailler des services carrière et des RH. Se montrer proche des étudiants et à l'écoute est l'étape la plus importante.
Vous vous posez des questions sur l'influence significative de l'IA générative sur les étudiants et les diplômés? Consultez notre étude menée sur 6000 personnes en Europe.
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